Séminaire Schibboleth - Actualité de Freud organisé pour la saison 2014 - 2015 sur le thème « Les figures de la cruauté » en six séances

Séminaire sous la direction de Michel Gad Wolkowicz

Argument

Les Figures de la cruauté se sont comme imposées dans la continuité des thématiques des précédents colloques et publications : Un monde en Trans — Transfert de transferts ou d’une hypocondrie du contemporain ; La Force du Nom ; Tensions et défis éthiques dans le monde contemporain ; La Psychologie de masse aujourd’hui ; Présence de la Shoah et d’Israël dans la pensée contemporaine ; L’intergénérationnel, Shoah/Israël, Nom sacré/Nom maudit — Généalogie de la haine/Transmission de la mémoire et du traumatisme ; États du Symbolique — Depuis « L’Homme Moïse et la religion monothéiste », en passant par Freud, Rothko, Appelfeld... Droit, Loi, Psychanalyse.

Intervention de Janine Altounian à la séance du 19 mars 2015 sur La cruauté dans les cultures et les idéologies :  « un héritage irrecevable ne peut être reçu que traduit dans une autre langue ».  

Voir l'ouvrage collectif Les figures de la cruauté - Entre civilisation et barbarie publié en 2016 sous la direction de de Michel Gad Wolkowicz à l'
issue du séminaire.

En effet, la cruauté est omniprésente dans nos actualités : dans les terreurs et massacres qui se répandent dans le monde, dans ce que nous entendons de la vie familiale, scolaire, du milieu du travail, des faits « divers », dans les univers médiatiques et virtuels (« informations » télévisées, films, jeux vidéos…). Elle fait partie des tendances élémentaires avec lesquelles chaque homme, chaque société doit composer. On la retrouve comme enjeu dans le développement de l’enfant, dans les relations d’objet, dans le rapport à l’autre et dans certaines expériences adolescentes liées aux difficultés de symbolisation et d’identité ; on la retrouve aussi dans les étapes d’une civilisation, dans les rituels structurant la vie d’une société et des sociétés ensemble (le sacrifice, la guerre en témoignent) ou encore dans les œuvres d’art, dans la littérature ; la place que lui font une époque, une pensée, peut caractériser un état de civilisation et de culture — ou de barbarie.
Aborder notre époque avec la cruauté comme symptôme, comme notion psychopathologique et indice culturel, en rappelle la dimension subjective et interroge la part de jouissance prélevée dans sa mise en scène par chacun, de sorte que le mal et la violence apparaissent non plus comme des abstractions métaphysiques ou sociologiques mais comme des réalités psychiques, affectant des sujets (individus ou groupes). Dans cette démarche, il sera opportun de différencier la cruauté du mal ( à propos duquel nous interrogerons le concept de « banalité du mal » et la place prépondérante qu’il a prise dans le débat d’après-guerre), des pulsions de mort ou d’emprise, de la destructivité, du sadisme.
En ce sens, nous proposons au départ de notre réflexion les remarques suivantes : La cruauté se caractérise fondamentalement par la jouissance perverse narcissique du pouvoir sur l’autre et d’emprise sur le psychique ou sur le réel du corps. Elle s’agit souvent en groupe, en masse. Avec sa quête de toute-puissance et d’illusion d’intégrité, elle constitue le ciment des régimes totalitaires et des organisations intégristes terroristes.

Les actualités nous apportent des exemples de la cruauté à laquelle se livrent les hommes en masse ; mais, en deçà des « conflits » armés, elle surgit dans le cours « ordinaire » des sociétés. Nous retiendrons à ce titre le traitement infligé à Ilan Halimi par ceux qui l’ont pris en otage, torturé, assassiné, par ceux qui se sont tus ; mais aussi nous analyserons ce qu’a traduit et révélé le film qu’en a donné Alexandre Arcady jusque dans les réactions des instances professionnelles (commissions de financement, critiques) et du public.
Nous interrogerons le rôle que jouent la modernité technologique et son univers hyper-spectaculaire et spéculaire dans la production des représentations et les modalités d’expression des manifestations contemporaines de la cruauté, via les écrans. Que soient ainsi favorisés l’accès et la diffusion d’images confondant le réel et le virtuel, la temporalité et l’historicité, la satisfaction ou la panique immédiates, la crudité du langage, la domination de la sensorialité, correspondrait-il à une résistance — régressive — à un travail psychique de métaphorisation, d’abstraction, à l’intellectualité et à la transmission, entamant les limites par lesquelles le « travail de culture » régule le jeu pulsionnel ? Les médias, leurs opérateurs et leurs spectateurs ne contribuent-ils pas à cette course à la jouissance tant par leur ambiguïté voire leur complicité dans la spécularisation et la théâtralisation des mises en scène de « l’information », que par leur cynisme à jouer de l‘émotion facile, du mimétisme grégaire, plutôt que de pratiquer l’enquête et l’analyse approfondies et historicisantes des faits et situations ? Il faudra se demander ce qui relie entre eux l’homme cruel, celui qui propage ses images, son scénario, et leur spectateur.

Comité Éditorial

Michel Gad Wolkowicz & Thibault Moreau.

Comité Scientifique

Michel Gad Wolkowicz, Thibault Moreau, Jacques Amar, Patrick Bantman, Isi Beller, Marc Cohen, Raphaël Draï, Jean-Jacques Moscovitz, Philippe Robert, Jacques Tarnéro, Monette Vacquin, Simone Wiener, Paul Zawadzki.

Programme du séminaire

Six soirées, de 20:00 à 22:30

 

Débat: 
La cruauté dans les cultures et les idéologies : «Un héritage irrecevable ne peut être reçu que traduit dans une autre langue»
Date: 
19/03/2015
Lieu: 
Institut Supérieur Européen de Gestion, 28, rue des Francs-Bourgeois, Paris (IV)
Langue: 
français